Ovations à la création mondiale de l'ensemble Dialogos à St Donat
De la pure magie créée par Katarina Livljanić et Pino De Vittorio dans leur interprétation du mythe d'Ariane et Thésée
Le choix de la direction du festival – les Soirées musicales de St Donat - de confier à Katarina Livljanic, artiste internationale d'origine zadaroise, le volet de la musique ancienne (autrefois spécialité du festival) a porté ses fruits.
Outre les artistes que la musicologue et professeure de la célèbre Schola Cantorum de Bâle a invité à Zadar ces dernières années, Katarina Livljanić (à la créativité artistique exceptionnelle) a transformé Saint-Donat, (à l'ombre duquel elle a grandi), en une scène pour y donner la première mondiale de son nouveau programme musical et scénique.
L'enthousiasme exprimé par les ovations tonitruantes, accompagné des cris « Bravo Kate ! » d'admirateurs locaux, est atypique pour les concerts de musique ancienne. Mais ce que Katarina Livljanić fait avec la musique ancienne et les textes anciens est tout aussi singulier, les transformant en créations contemporaines captivantes qui dépassent largement un simple effort de reconstruction et de reproduction « fidèles » du patrimoine ancien.
Ce fut également le cas samedi dernier avec la représentation enchanteresse d'Ariane en vie, produite par l'ensemble Dialogos, qui comprend également deux collaborateurs de longue date de Katarina Livljanić, le violoniste Albrecht Maurer et le flûtiste Norbert Rodenkirchen.
Le dévouement artistique et le perfectionnisme du jeu musical sont clairement démontrés par la décision d'Albrecht Maurer, comme il nous l'a lui-même confié, d'acquérir une nouvelle viole pour ce projet. Le son de cette viole convient mieux à la Renaissance que celui de ses autres instruments et se marie plus harmonieusement avec les cordes du luth joué par Bor Zuljan, maître slovène international et professeur bâlois de cet instrument. Le trio instrumental, composé d'improvisateurs virtuoses, a créé, là où c'était nécessaire, une musique qui transcende le temps et les époques stylistiques, à l'image du mythe d'Ariane, son fil, la trahison, l'amour et le malheur, chantés à travers les siècles.
Katarina Livljanić a trouvé l'inspiration pour ce projet en étudiant et en sélectionnant les premières traductions et interprétations poétiques d'Ovide en italien du XIVe au XVIe siècle, de sorte que l'expression musicale, ancrée au Moyen Âge dans la plupart de ses projets précédents, est ici adaptée au style de la première Renaissance, qui s'est avéré particulièrement efficace dans les rythmes syncopés et les mélodies dansantes des frottoles.
La mise en scène minimaliste, ainsi que la contribution au scénario, signée Olivier Lexa, a puissamment amplifié les émotions. Cependant, l'histoire d'Ariane ne serait pas complète sans Thésée, le héros qu'elle a aidé à tuer son monstrueux frère, le Minotaure. Le partenaire merveilleux, ingénieux et charismatique de Katarina Livljanić était Pino De Vittorio, qui s'était déjà présenté au public de Zadar l'année dernière. Son premier chant était une chanson traditionnelle, écho puissant des temps anciens où l'extrême sud de l'Italie faisait partie de la Grande Grèce, imprégnée de mythes. Difficile de dire ce qui captive le plus l'attention des spectateurs et des auditeurs : son apparence physique, l'expressivité de son visage et de son corps, semblable à un olivier millénaire, robuste et noueux, ou son chant.
Ce qui s’est créé et embrasé entre les deux chanteurs ne peut être décrit comme une simple alchimie. C'était de la magie, un acte artistique du plus haut niveau où vertus et faiblesses humaines sont sacrifiées sur l'autel du destin, en s'élevant en même temps au-dessus de tous les dieux qui gouvernent ce destin. Et ainsi de suite jusqu'au final, dont la répétition a satisfait l'enthousiasme du public, louant l'art qui, seul, garantit à toute histoire d'hommes et de dieux une pérennité plus forte que le temps, la mort et l'oubli.